
En ce mois de Safar, au cours duquel sera cĂ©lĂ©brĂ©, dans quelques jours, le dĂ©part en exil du Serviteur du ProphĂšte, notre vĂ©nĂ©rĂ© guide et unique espoir dans les deux mondes, nous exprimons nos vĆux de paix, de salut et de prospĂ©ritĂ© Ă tous.
Nous souhaitons une longue vie et exprimons notre profonde gratitude Ă Serigne Mountakha MbackĂ©, le digne et valeureux reprĂ©sentant de Serigne Touba, pour son Ćuvre multiforme au profit de lâIslam, de la communautĂ© mouride et de toute la nation. Nous exprimons les mĂȘmes vĆux pour tous les guides religieux du SĂ©nĂ©gal.
Nous en profitons pour solliciter Ă©galement de nos acteurs politiques une attitude plus conciliante, plus responsable et plus soucieuse du bien-ĂȘtre de nos populations et de l’avenir du pays dont ils ont la direction. Pour ce faire, nous exprimons, Ă quelques encablures du Grand Magal, les vĆux suivants (comptant sur le Seigneur Tout-Puissant pour les exaucer) :
1. AprĂšs sa dĂ©cision salutaire de renoncer Ă un 3e mandat, magnifiĂ©e par tous, nous attendons du Chef de l’Etat, Monsieur Macky Sall, une autre initiative de dĂ©passement de la mĂȘme envergure. Celle consistant Ă la libĂ©ration gracieuse (provisoire ou non) de l’opposant Ousmane Sonko et de tous les autres prisonniers arrĂȘtĂ©s pour des raisons plus ou moins politiques. Le mĂ©canisme de mise Ćuvre de cette dĂ©cision, au-delĂ de tout juridisme stĂ©rile ou de mauvais aloi et des arguties oiseuses classiques, peut ĂȘtre aisĂ©ment et rapidement imaginĂ©, pour qui connaĂźt la structure politico-juridique de notre pays.
2. Une telle mesure irait indubitablement dans le sens dâun apaisement du climat sociopolitique du SĂ©nĂ©gal, en ces contextes troubles et gros de nuages sombres pour sa stabilitĂ©. Elle se justifie Ă©galement pour des raisons tout simplement « humanitaires », au vu surtout des informations alarmantes sur lâĂ©tat de santĂ© de Ousmane Sonko et des autres prisonniers. LâĂ©ventualitĂ© dâune issue tragique ou irrĂ©versible de cette situation (Ă Dieu ne plaise !) entrainerait des consĂ©quences graves et des sĂ©quelles durables dont nul ne peut imaginer les impacts sur lâavenir. Prendre ce risque (fut-il jugĂ© minime) nous paraĂźt excessif, quels que soient les enjeux actuels de pouvoir, de compĂ©tition Ă©lectorale et de rĂ©pression Ă©tatique.
Lenn li, daray Ă dduna jaru koâŠ
3. Cette dĂ©cision irait aussi dans le sens du vĆu de compassion et de dĂ©passement exprimĂ© rĂ©cemment par Serigne Mountakha, lors de la visite de la dĂ©lĂ©gation envoyĂ©e par lâopposition. Quoique sa posture de guide impartial, au service de tous, ne lui permette dâadopter certaines postures publiques radicales (propres aux « activistes »), lâattitude et le souhait du Khalife des mourides, et de tous les grands dignitaires religieux, – secret de Polichinelle – a toujours Ă©tĂ© la prĂ©servation de la paix sociale. De façon discrĂšte ou publique. Une mission dans laquelle le PrĂ©sident de la RĂ©publique et tous les acteurs politiques responsables se doivent de les aider, sans double jeu, populisme ou dĂ©magogie.
4. A la suite dâune telle dĂ©cision, nous attendons Ă©galement des membres de lâopposition (ceux des franges « radicales » et « ultra » de PastĂ©f, en particulier) une attitude plus conciliante, plus responsable et moins va-t-en-guerre, dĂ©barrassĂ©e de la violence symbolique, verbale et physique que beaucoup leur reprochent. De sorte Ă permettre une rĂ©habilitation progressive de leur parti dont la rĂ©cente dissolution semble plus que problĂ©matique pour lâavenir de notre dĂ©mocratie. Une attitude moins extrĂȘme de Ousmane Sonko, qui a le devoir absolu dâarrĂȘter sa grĂšve de la faim, pourrait notablement faciliter cette sortie de crise ; surtout Ă la suite de lâappel pressant du vĂ©nĂ©rĂ© Khalife.
5. Nous demandons, enfin, Ă toutes les bonnes volontĂ©s (sociĂ©tĂ© civile, partenaires extĂ©rieurs, leaders d’opinion, personnalitĂ©s influentes, etc.) dâĆuvrer dans le sens de ces mesures dâapaisement et de pacification de lâespace public dont lâatmosphĂšre est plus que jamais viciĂ©e par ce manque de recul et les radicalitĂ©s clivantes qui se cristallisent de part et dâautre. Le sentiment profond de dĂ©couragement, de dĂ©solation et dâinquiĂ©tude tĂ©tanisĂ©e qui a gagnĂ© une grande partie de lâopinion publique ne nous semble nullement de bon augure pour le futurâŠ
Puissions-nous tous nous rappeler la leçon magistrale de Pardon et de DĂ©passement qui nous a Ă©tĂ© lĂ©guĂ©e par Cheikh A. Bamba, dont nous nous apprĂȘtons Ă cĂ©lĂ©brer l’Exil, en un contexte non moins trouble. Le Serviteur du ProphĂšte (PSL), qui a Ă©tĂ© injustement emprisonnĂ©, pendant 7 longues annĂ©es, dans des conditions extrĂȘmement difficiles, loin des siens, constamment persĂ©cutĂ© ou dĂ©tenu en rĂ©sidence surveillĂ©e par lâEtat colonial, durant les 33 derniĂšres annĂ©es de sa vie. Mais qui, en dĂ©pit de toutes ces vicissitudes, de ces brimades et Ă©preuves, dĂ©clara avec une grandeur dont la grande Histoire fut rarement tĂ©moin :
« J’ai pardonnĂ© Ă tous mes ennemis pour lâamour du Seigneur qui les a Ă©cartĂ©s de moi Ă jamais. Aussi ne songe-je nullement Ă me venger. J’ai accordĂ© mon pardon Ă tous mes ennemis avec puretĂ© de cĆur…»
(Muqadimatul AmdĂąh)
Une telle leçon de patience, de retenue, de misĂ©ricorde, dâamnistie, de compassion et de gratitude infinie envers Dieu qui, Seul, prĂ©side aux destinĂ©es de Ses crĂ©atures. Cet attachement rare aux Hautes QualitĂ©s et principes enseignĂ©s par lâIslam, la profonde spiritualitĂ© ou, tout simplement, lâhumanitĂ©.
Le vĂ©ritable sens du Magal, câest prĂ©cisĂ©ment cela.
(Par A. Aziz Mbacke Majalis )